Interview : Ioio - "Le nom du projet vient de la mythologie"

Après deux single choc, "Nuit" et "Fusée", très séduisants, Ioio revient avec son 1er EP "Inflorescence". À cette occasion elle nous fait la gentillesse de répondre à nos questions.

On avait été emballés par l'écoute de son premier EP "Inflorescence" en fin d'année dernière. Celui-ci sort aujourd'hui, vendredi 12 mars. Et autant dire que notre premier sentiment est toujours présent. D'ailleurs on remet mot pour mot ce qu'on avait déjà écrit l'an dernier à propos de "Inflorescence" :
"Un univers en 7 titres remplis d'histoires dignes d'une épopée, aux compositions originales tantôt en français tantôt en anglais, et dans lequel sa voix cristalline se mêle aux sonorités électroniques des machines et des synthétiseurs qu'elle manie avec dextérité comme une extension d'elle-même."
Alors pour fêter cela, on a demandé à Ioio de se prêter au jeu de l'interview. C'est parti.


Aujourd’hui sort ton premier EP, « Inflorescence ». Comment tu te sens ? Quel est ton sentiment, fébrile ?  impatiente ? Curieuse des réactions des fans ?

Cette première sortie est très émouvante en effet, les sentiments partent dans tous les sens : j'ai le trac, je suis super heureuse, impatiente de voir ce que va devenir l'EP dans le monde, soulagée et en même temps un peu nostalgique de me dire que "ça y est, cette étape est passée!". Je suis très curieuse d'avoir des retours car l'EP voyage dans plusieurs styles musicaux, des chansons pop en français et en anglais, en passant par des titres destructurés, allant vers l'ambient, la techno et le dub. J'ai hâte de savoir ce que l'écoute entière de cet objet musical va créer dans le cœur des gens, après avoir sorti seulement deux singles séparément de l'ensemble auquel ils appartiennent.

Avant aujourd’hui, tu avais sorti le single "Nuit" et "Fusée". Quel enseignement as-tu eu en retour, et quelles réactions du public ?

C'était une super expérience de sortir mes deux clips "Nuit" et "Fusée" pour annoncer l'EP. Le travail sur l'image et l'identité du personnage Ioio a été très précieux, j'ai découvert plein de choses sur mon propre projet, révélées par les sensibilités des personnes super talentueuses qui ont travaillé avec moi. Les réactions ont été très positives et encourageantes, cela m'a fait beaucoup de bien en cette période si étrange où les rapports sociaux sont diminués. J'ai beaucoup appris sur la promo, sur comment réussir à mieux prioriser et organiser les différentes étapes d'une sortie - on peut vite se sentir dépassé en tant qu'indépendant quand on gère tous les aspects de la chose ! J'ai pu commencer à me construire un entourage aussi, avec la signature d'un contrat de distribution avec Alter-K distribution. Je reste attentive aux opportunités pour ce qui est des labels et des tourneurs - ce serait super pour la suite du projet !

Avant de parler de "Inflorescence", j’aimerai qu’on revienne un instant sur toi, est-ce que tu peux te présenter, c’est quoi, c’est qui ioio ?

Je suis auteure-compositrice-interprète et productrice autodidacte. Ioio est mon projet musical en solo, dont les titres glissent entre chansons à texte pop et sons electro. Le nom du projet vient de la mythologie : c'est un clin d’oeil à Io, fille d’un dieu fleuve, que Zeus métamorphosa un jour en vache. Après un long périple, Io retrouve finalement forme humaine et reprend sa destinée en main. Sa légende évoque un désir de réincarnation, une puissante envie de se retrouver soi-même. Ce sont des symboles qui me parlent beaucoup, car je suis persuadée que la musique, le chant, sont des outils surpuissants pour trouver sa place dans le monde et faire du bien autour de soi.

Peux-tu nous parler de ton parcours, qu’est-ce qui t’a donné envie de faire de la musique, et ce qui t’a portée jusqu’à ioio ?

Quand j'avais 5 ans, je voulais devenir chanteuse. Je faisais des spectacles dans la cour de l'école devant mes copains, et plus tard j'ai appris seule le piano et la guitare. Cela dit, plus j'ai avancé dans mes études, plus j'ai perdu de vue mes activités artistiques - après une prépa littéraire, je suis finalement arrivée en école de commerce. C'est lors de ma dernière année d'étude en échange universitaire au Mexique en 2018 que j'ai pu prendre du recul et me dire "mais pourquoi je ne fais plus de musique?". Ça a été une période intense, ça me faisait très peur de m’autoriser à faire ce que j’aime, de prendre le risque de ne pas avoir un contrat stable en sortant de l'école comme la plupart de mes camarades. Et puis tout doucement, j'ai remis la création au centre de ma vie, et j'en suis tellement heureuse ! Et c'est bien aussi aujourd'hui de pouvoir m'appuyer aussi parfois sur une formation "business" pour porter mes créations. C'est un bagage hybride et atypique, mais c'est riche aussi, en un sens!

Quelles sont tes influences plus largement ; des artistes, des courants musicaux qui te poussent à composer ?

J'écoute de la musique diverse mais je suis très inspirée en général par des voix et personnalités féminines fortes telles que Alice Phoebe Lou ou Khadja Bonet qui ont un univers qui me semble très sensible et original, intime et recherché au niveau des productions. Je suis aussi inspirée par la nouvelle scène française electropop, notamment l'Impératrice et Agar Agar (encore des voix de femmes, finalement). J'admire énormément Bjork pour son travail tellement inventif, sa voix limpide et si juste qui s'affranchit de toutes les barrières.


Cet EP "Inflorescence" raconte toute une histoire. Quelle a été sa genèse, l'idée de départ qui t’a inspirée et amenée jusqu’à l’EP ?

Certaines des chansons ont été composées en 2015 sur le dictaphone de mon téléphone, alors que je n'avais jamais touché à un logiciel de production musicale - ces chansons ont eu mille versions, m'ont accompagnées alors que je progressais, que je me trompais, que je faisais de superbes rencontres. L'EP est un peu comme mon journal intime de musicienne en devenir, c'est donc un moment très spécial de l'offrir au monde. Les 7 chansons qui le forment aujourd'hui représentent pour moi un cycle : celui de la recherche de soi. De la première chanson "Eve At Dawn" (Eve à l'aube) et "Eve at Dusk" (Eve au crépuscule), on avance dans un monde intérieur fait de questions qui miroitent à l'infini, à l'image des questions qui m'ont habitées pendant tout ce processus de création.

Et comment s’est passé le travail sur l’EP, la composition, l’enregistrement, le mixage, le mastering, bref tout le travail collaboratif autour ?

Après avoir composé et produit les 7 démos, la rencontre avec Samy Gérard de studio simone rec a été un vrai révélateur. J'ai enregistré à son studio et il s'est occupé de la réalisation artistique; je lui suis tellement reconnaissante car il m'a beaucoup guidée durant toute cette période. Il s'est aussi occupé du mix qui a vraiment mis en valeur les tracks. Le mastering a été réalisé de main de maître par Emilie Daelemans. Les tournages des clips ont aussi été des moments de travail collaboratif extrêmement intéressant : je travaille depuis mon premier clip "Fusée" avec Leia Vandooren à la DA, qui continue à me surprendre chaque jour par l'inventivité de son regard. Elle a aussi designé tous les costumes et make-up des clips. Les réalisateurs Antoine de Bujadoux et Donatienne Berthereau ont chacun apporté leur patte à "Fusée" et "Nuit" qui sont à mes yeux de vraies oeuvres - c'était très important pour moi que ce travail soit fait en collaboration, et que ce ne soit pas une "commande" faite de ma part où j'aurais déjà tout décidé sans les laisser s'exprimer. J'en profite aussi pour remercier les équipes techniques composées d'Alexandre Delol, Alexandra Pocquet, Pauline Penichout, et Coline Lubrina dont les images sont si belles. J'ai aussi eu la chance de travailler avec l'artiste Simon Lazarus qui a créé les pochettes des deux singles et celle de l'EP, dont j'admire beaucoup le travail si fin sur les formes et les textures qui scintillent et rendent la dualité du projet, le chaud d'une voix organique et le froid des sons et machines électroniques. La photographe Lucille Pellerin s'est aussi jointe au projet avec de superbes photos promos récemment - je n'en reviens toujours pas d'avoir rassemblé autant de superbes artistes autour de ce projet, c'est un si beau cadeau !

Quelle est la prochaine étape après cet EP ? Tu repars en studio ? Des projets en prévision ?


Un autre titre auquel j'ai collaboré sort justement aujourd'hui (c'est un pur hasard) : il s'agit de Même Si, auquel je prête ma voix, composé et produit par les artistes berlinois El Mundo & Zazou. Pour ce qui est de mes projets en solo, j'ai neuf démos sur lesquelles je travaille actuellement, que je souhaiterais sortir par trois, à la manière d'un "concept-album" où les titres sont conçus pour s'enchaîner. Il y aura un EP de trois titres pour fêter le jour, un EP de trois titres pour fêter le soir, et le dernier pour fêter la nuit. J'ai envie d'intégrer plus d'instruments organiques pour mes prochaines productions, "Inflorescence" étant très majoritairement produit "in the box", avec des plug-ins logiciels.

On fête un anniversaire atypique, celui de la pandémie. Quel est ton ressenti sur cela, comment tu l’a vécu ?

Cet anniversaire résonne pour moi d'une manière toute particulière, car c'est aussi l'anniversaire du décès d'un de mes parents, qui n'était pas corrélé au covid. Cette période a été très difficile l'année dernière, et mes projets de création m'ont énormément aidé à réussir à trouver la joie malgré tout - je crois profondément au pouvoir guérisseur de la musique, et travailler en collectif sur un projet aussi personnel avec le tournage des clips notamment m'a beaucoup aidé à capter la beauté du monde malgré tout et à rester positive. J'espère de tout coeur que la situation sanitaire s'améliorera et que la musique pourra résonner à nouveau en public.




On va faire un peu de profilage pour faire un peu plus connaissance. Si on te proposait de collaborer avec un artiste sur un projet, ce serait lequel et pourquoi ?

J'adorerais collaborer avec La Chica Belleville dont le clip La Loba m'a beaucoup remué - cette force brute, animale, une force qui vient de la terre, dans la transe et le mantra... tout ça m'a beaucoup touché et je pense que j'apprendrais beaucoup à aller explorer ces facettes de l'humain, alors que mon projet est pour le moment très aérien et léger. Cela donnerait sans doute un autre poids, une autre consistance à mes créations de collaborer avec cette artiste.

Une nouveauté musicale que tu viens d’écouter et que tu conseilles ?

Yol le nouvel album d'Altin Gun !

Un album préféré que tu écoutes en boucle ?

J'ai découvert il y a peu Alice Phoebe Lou, une artiste sud-africaine. Je me passe depuis ses albums en boucle - j'aime énormément son titre "Something Holy".

Une personnalité passé ou présent que tu rêves de rencontrer ?

J'adorerais rencontrer Bjork, qu'elle me parle de son expérience, qu'elle me dise comment elle "voit" la musique, comment ça se passe dans sa tête quand elle produit et compose.

Un film, une série, culte pour toi ?

Il y en a tellement! Un film que j'ai vu récemment car la personne m'a dit que ça lui faisait penser à "Fusée", c'est La Belle Verte - un film de Coline Serreau des années 90, mais encore tellement actuel selon moi sur le sens de la vie humaine et les soucis écologiques d'aujourd'hui.

Une BO de film ou série culte pour toi ?

La BO de Blade Runner de Vangelis!

Un dernière question pour terminer l'interview ; si tu avais un message à passer à tes fans ce serait quoi ?

Je leur enverrai plein d'amour et de reconnaissance, pour que chacun trouve la force de faire éclore ses projets et envies profondes comme de jolies fleurs.

Joséphine Hurtut, alias Ioio, répond à nos question pour la sortie de son premier EP Inflorescence
© Leia Vandooren


On remercie chaleureusement Ioio pour ses réponses et on vous invite à découvrir son premier EP "Inflorescence" qui sort ce jour.

À cette occasion, Ioio sera en live sur Facebook pour le présenter au public. Le lien vers la plateforme est Ici.






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