Interview : La Pietà - "J’avais besoin de crier mes mots."

Suite à la sortie de son dernier clip "Un Monde Meilleur", on a décidé de passer La Pietà à la question, mais avec bienveillance évidemment. C'est notre rencontre du jour.

C'est vrai que l'on suit depuis quelques temps La Pietà et les mots de son dernier clip "Un Monde Meilleur" nous ont touchés à leur façon :
Nous ne sommes pas en guerre, Monsieur,
Si ce n’est contre votre vision de la vie.
Nous sommes en quête, 
C’est mieux.
D’un monde meilleur,
Dés aujourd’hui.
Voilà pourquoi on a souhaité en savoir plus...



Bonjour La Pietà. Avant que l'on parle de ta dernière vidéo « Un Monde Meilleur », j’aimerais que l'on revienne un instant sur ton parcours et que tu te présentes pour nos lecteurs. Qui es-tu ? D’où viens-tu ? Quel est ton parcours ?

Je m'appelle la piéta ou plus exactement c'est mon nom d'artiste depuis 4 ans. je faisais de la musique bien avant ça, et j'ai eu différents projets artistiques… Avec La Pietà, j'ai eu envie de m'offrir une totale liberté artistique et c'est ce qui fait que ce projet est pluridisciplinaire : je fais à la fois de la musique, de l'écriture, du dessin et de la vidéo. Avec ce projet, je refuse d’être enfermée dans une case. 


Tu n'es donc pas tombée dans la marmitte de la musique toute petite alors ? 
Je n’ai pas du tout baigné dans la musique quand j’étais petite, au contraire, personne n’avait l’oreille musicale dans ma famille. C’était plutôt un milieu littéraire, et donc la première chose que j’ai faite, c’est écrire et dessiner. J’ai voulu mettre tout ça en musique plus tard, dans l’adolescence.

Qu’est-ce qui t’a amené à te lancer véritablement dans la musique, à te dire « c’est ça que je veux faire » ?

D’abord, j’en avais besoin. J’avais besoin de crier mes mots, et c’est comme ça que j’ai commencé à prendre une guitare et monter des groupes. Le déclic cependant, qui m’a fait me dire que je voulais en faire « mon métier », ce fut le jour ou j’ai eu la chance de voir un concert aux arènes de Nîmes sur le coté de scène. Ce soit là, l’affiche c’était Muse en première partie, puis Pj Harvey, puis Noir désir. Voir tout cela en étant sur le coté de scène, c’était magique. Et je me suis dit « voilà ce que je veux faire, ne plus être sur le coté de la scène, être sur scène, et transmettre toutes ces émotions »

Y’at-il eu une rencontre déterminante ?

Rapidement après ce fameux concert, j’ai mis des petites annonces pour chercher des musiciens. J’ai rencontré Fx, qui est devenu mon batteur, mon partenaire, mon frère. Nous avons monté notre groupe, découvert le métier de la musique, tourné dans 500 bars partout en France, il a cru en moi avant tout le monde, et je n’aurais jamais fait tout ça si je ne l’avais pas rencontré. Il m’a littéralement sauvée. Peu de temps après, nous avons rencontré Virginie Auclair, ancienne Directrice générale de chez Columbia, qui venait de monter sa boite d’édition. Elle nous a pris sous son aile, et nous a fait découvrir tout de ce métier qu’on ne connaissait pas.

Parle-moi un peu de tes influences dans le monde de la musique, des artistes avec lesquels tu as passé ton adolescence.

Petite, il y avait peu de musique à la maison, mais quand meme, de la chanson française, parce que mes parents aimaient les textes avant tout. Mon premier concert, ce fut Renaud. Adolescente, j’ai découvert le grunge. Et j’ai donc grandi dans ce mélange de rock, de pop et de chanson française.


Tu peux nous parler de ton process d’écriture, comment se passe la conception d’un single, d’où te viennent tes idées, est-ce c’est par réaction à l’injustice que tu décides d’écrire, en tout cas c’est impression que j’ai, que tu bouillonnes et que tu es à fleur de peau, niveau écriture, et pas seulement pour tes textes de chanson (je penses notamment à « Tapez » ou « Ma guerre est finie ») mais pour le livre. 

J’écris tout le temps dans ma tête en fait. Ce n’est pas forcément en « réaction » a quelque chose de précis. Parfois oui. Parfois j’ai besoin d’exprimer une colère ou une grande tristesse et c’est comme ça que ça sort. Parfois, c’est juste que je regarde le monde et qu’il se transforme en mot dans ma tête. Ensuite je me mets devant ma feuille ou mon ordi, et je pars de ça, et puis ça vient. J’adapte ensuite, si ca doit devenir un texte de chanson, ou un livre ou autre. Oui, l’injustice me fait écrire, mais pas seulement. C’est souvent l’amour ou le désamour qui m’inspirent aussi. Et puis tout ce que je vois, que j’entends, que je sens autour de moi. 

As-tu des thématiques particulières que tu souhaites aborder plus spécifiquement dans tes morceaux ?

Non. Le but de La Pietà au départ, c’était de raconter une histoire bien particulière, celle que je raconte dans mon roman. Cette histoire veut montrer comme on peut se perdre totalement dans notre vie, et comme on peut se reconstruire à partir de ces ruines. Voilà pourquoi ce projet était très sombre, il racontait une période sombre. Je voulais que ce projet dure seulement 3 ans, puisqu’il racontait uniquement cette histoire. J’ai finalement décidé de garder ce nom d’artiste, et de m’offrir la liberté de changer de thématique sous un même nom. C’est ce qui fait que le projet est assez différent de ce qu’il était il ya  4 ans.


Quelle est la prochaine étape pour toi artistiquement, après la sortie de cette vidéo, tu repars en composition ? Retour en studio ? 

J’ai un album et un roman qui sort, c’est déjà un gros projet ! Ces sorties ont été retardés a cause de tous les évènements, et donc l’album sort le 19 juin, et le roman d’ici juillet. En parallèle, j’ai écrit plein de chansons pendant le confinement, j’ai commencé un autre roman, un woman show et un spectacle pour enfant, mais on verra tout ça plus tard ! D’abord il faut faire vivre cet album !


Parle-nous justement de ton dernier single « Un Monde Meilleur », qu’est-ce qui te l’a inspiré, quelle est sa genèse, sa conception ? Penses-tu réellement qu’on nous prépare un monde meilleur (après meilleur, ça dépend pour qui …)

J'ai écrit ce texte en réaction au discours d'Emmanuel Macron mais aussi en réaction avec tout ce qu'on vivait avec le climat anxiogène qu'il y avait et avec tous les discours qu'on nous balance à longueur de médias… J'aurais très bien pu faire une chanson en colère, il y avait vraiment de quoi être en colère ces derniers temps et vu mon projet ça pouvait coller… Mais justement, je me suis dit que c'était trop une option de facilité de déverser de la haine et de la colère alors qu'il n'y avait déjà que ça partout, donc j'ai préféré essayer de faire l'inverse et avoir un discours positif, me concentrer sur toutes les petites choses et belle chose que je vois dans le quotidien… 
J'avais envie de parler de tous ces gens que je croise dans ma vie, qui sont loin des médias, loin des gouvernements, loin des discours politiques et pourtant qui sont militants parfois même sans s'en rendre compte. Ils essaient de changer les choses et de créer un monde meilleur dans la vie de tous les jours, dans leur vie en ayant des valeurs de bienveillance et d'humanisme et en les appliquant dans leur quotidien… je les vois très souvent ces gens-là dans mes concerts sur la route etc… ils existent, et ils sont nombreux, mais on ne parle pas d’eux. 
Donc moi j'avais envie d'en parler et de les montrer aussi dans mon clip. Ce sont des gens qui croient dans la culture, en l'éducation, en la poésie et en la solidarité. Donc le propos ce n'est pas de savoir si on va nous offrir un monde meilleur, mon discours c'est de penser qu'il faut arrêter d'attendre que le monde change à grande échelle, c'est à nous de le changer dans chacun de nos gestes, dans chacun de nos mots. 
Le monde ne change pas du jour au lendemain, ça n'a jamais été le cas et ça ne sera jamais le cas… Il faut des siècles pour qu'un système change, les choses se font petit à petit, c'est un jeu de domino et c'est pour ça que chacune de nos actions à notre petit niveau est importante, même si on se sent parfois découragés.  
J'en avais marre de voir tous les articles et tous ces posts négatifs, tous ces gens qui crachaient les uns contre les autres... et c'est donc comme ça qu'est né ce texte... il se trouve qu'un bon ami à moi Chris Merlyn m'avait envoyé des instru qu'il avait faites, et que je trouvais top, j’ai eu envie d’adapter mon texte à l’une de ses musiques, et c’est comme ça qu’est née la chanson. Elle est très différente des morceaux précédents de La Pietà pour cette raison, parce que la musique n’a pas été faite par moi, et aussi parce que j’ai envie d’aller vers quelque chose de plus lumineux.


Si on te proposait de collaborer avec un artiste sur un projet, ce serait lequel et pourquoi ?

Je collabore déjà avec plein d’artistes. Des plasticiens, des comédiens, danseurs etc. Je suis ouverte à toutes les collaborations artistiques. J’aimerais bien faire un clip avec David Fincher, un autre avec David Lynch et un avec Asia Argento


Quels sont les retours que tu as des fans par rapport à ta musique ? Et également par rapport à ce dernier titre ?

Les fans sont fans ☺ Ils me soutiennent beaucoup. Je n’aime pas les appeler des « fans » pour moi c’st une communauté, car c’est simplement ça : une communauté de gens qui se réunissent autour de même valeurs. Certain ont certainement été perturbés par le changement de La Pietà au fur et à mesure des mois et des années. Certain auraient aimé que je continue dans la lignée de mon premier titre "la moyenne", et peut-être que je les ai déçus en faisant des choses beaucoup plus pop en chanson. Mais pour moi la vraie liberté et la vraie rébellion c’est justement d’être là ou on ne m’attend pas. On m’a cataloguée « artiste punk désabusée » avec ce premier titre, et j’ai joué à être encore plus punk en proposant quelque chose de beaucoup plus pop derrière. Et je jouerai encore, donc peut-être que quand on dira que la pietà c’est de la pop positive, je redébarquerai avec un titre électrique et vénère !


Allez, on passe à la question Inspi/transpi : Qu’est-ce qui t’inspire musicalement parlant ? Et qu’est-ce qui te fais suer musicalement parlant ?

Tout m’inspire. J’aime la vie, même si j’ai l’impression parfois que la vie ne m’aime pas. Ce qui me fait suer, c’est le monde virtuel pas mal, qui cherche sans arrêt à rendre tout binaire. Il faut avoir un avis sur tout, bien tranché, on est soit noir soit blanc, le débat d’idée n’existe plus. Mais bon, il suffit de se déconnecter.


Comment vois-tu l’avenir suite au covid, maintenant qu’on sort du confinement ?

La vie va continuer, avec ce qu’elle a de merveilleux et de désespérant. Comme je le disais, les choses ne changent pas en une semaine, ni en 2 mois. Donc les choses vont reprendre, peut-être que d’infimes changements se feront dans nos tronches et que ça évoluera, mais a un niveau si microscopique que ce ne sera pas perceptible sur l’ensemble.


Personnellement comment as-tu vécu cette période presque antisociale ? Des idées musicales à venir en dehors de ton dernier titre, des nouvelles thématiques d’écriture à venir ? Un regard différent sur le monde ?

Je suis une solitaire, ça n’a pas changé énormément de choses pour moi, mise à part bien sûr que ça a annulé tous mes concerts etc… Mais j’ai relativisé. J’étais contente de me reposer aussi. Je n’ai pas réussi a écrire sur autre chose que sur ce que l’on vivait. Mais par contre, j'ai bossé tout le temps, j’ai été très active, j’ai mis en place de nouvelles manières de faire pour continuer à faire vivre la musique, parce que je réfléchissais à de nouveaux modèles économiques. J’ai notamment mis en place la possibilité de me faire jouer chez les gens… Sur ma boutique en ligne on peut donc maintenant acheter mes concerts et me faire jouer dans son salon son jardin etc.  
En parallèle j'ai lancé ma page sur Patreon, c'est un site qui permet de mettre en lien direct les artistes, les créateurs et leur public… ça évite les intermédiaires et ça permet que l'argent aille directement aux artistes pour leur permettre de pouvoir continuer à créer. Concrètement les gens peuvent « s'abonner à La Pietà »… En échange ils reçoivent du contenu régulier et exclusif, je leur partage des titres inédits, des brouillons, les vidéos, je leur montre comment je travaille et je leur offre des choses… C'est important pour moi de mettre en place cette communauté comme ça, ce qui offre beaucoup plus de liberté que de passer par une maison de disque etc… 
Quand on parle du monde de demain et d'un monde meilleur je pense que ça passe par ce genre de choses, ce sont des actes militants de changer notre manière de consommer en consommant de manière plus directe et en arrêtant de rendre très riche des intermédiaires… Consommer local plutôt qu’en supermarché, acheter des choses à des créateurs en direct plutôt que chez Zara, soutenir de manière directe des artistes indépendants… Voici des petits gestes qui peuvent changer véritablement le monde si on les applique tous au quotidien.    


Le monde d’après pour toi, ca va vers quoi ?

Ce que je viens de dire : être conscient et responsable de nos actes, les faire avec bienveillance, justice, solidarité, redonner leur justes valeurs aux choses, et remettre les choses importantes au cœur des choses : éducation, santé, culture.


Allez, pour finir, on passe à la question profilage : Un mot fétiche que tu dis tout le temps machinalement ? 

Je dis souvent le mot couilles je crois.


Un film / série/ culte pour toi ?

« La crise » 


Une BO de film culte selon toi

New York Mélody, et into the wild


Un album culte pour toi ?

Live through this de Hole


Un livre de chevet en ce moment ou que tu nous conseilles ?

Le Bug humain, le mythe de Sisyphe et Mange, prie, aime


Une peinture, oeuvre d’art, photographie, architecture qui te scotche et que tu aimerais que les gens découvrent ?

La Pietà de Michelange, et les œuvres de Benjamin Carbonne de Montpellier


Une nouveauté que tu viens d’écouter et que tu me conseilles ?

Yseult et Sueur


Une personnalité passé ou présent que tu rêves de rencontrer ? 

Courtney love 


Si t’avais une machine à voyager dans le temps, t’irais jeter un oeil ou ça ?

Un concert de Nirvana


La question carte blanche : Y’a-t-il un projet ou truc dont on n’aurait pas parlé, allez, t’as carte blanche.

Fête de sortie d’album chez moi avec plusieurs artistes invités et retransmis en direct en streaming le 19 juin de 17 a 22h… reprise de la tournée a partir de l’automne, n’hésitez pas à me faire jouer chez vous, c’est comme ça que vivra la pietà !


Et un conseil pour les nouvelles générations, histoire de changer la société ?

Aimez.

Rencontre avec La Pietà après son clip  "Un Monde Meilleur".

Pour en savoir plus :

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