Manimal dans la peau de Footix

La coupe du monde et ses horreurs vont bientôt faire leur apparition. Et chaque fois, cela me rappelle l'un des moments les plus sombres de notre histoire, à savoir celui de la création de la mascotte Footix. Mais il ya eu pire : Manimal.

Un lien de parenté

Aussi, lorsque j'ai repensé à ce sinistre personnage footbalistique, je me suis aussitôt souvenu de sa ressemblance avec l'une des pires séries TV de l'histoire et je suis remonté au grenier pour la retrouver et vous en faire part. Il faut que la France sache ! 

Jugez par vous-même du lien de parenté évident entre le Footix et le Faucon de notre fameuse série.

Voyage dans le pire

C'est donc aujourd'hui un petit voyage dans le temps qui vous est offert. Je vous propose en effet de découvrir une série pseudo-naturaliste, bien loin de Daktari, qui a bouleversé le monde entier et qui, depuis, est resté gravée dans toutes les mémoires.

Pour vous en assurer, il vous suffit de voir les premières secondes du générique pour être en effet conquis et transporté dans l’univers onirique de notre héros, aux frontières de l’homme et de l’animal. 

Comment ? Un héros qui croise l’intelligence humaine (si on peut appeler cela comme ça) avec l’instinct animal ? Inutile d’en dire davantage, voici MANIMAL, l’homme-animal ! Superbe !

Petit sondage

Lorsque l’on demande aux téléspectateurs d’établir le top 10 des séries TV des années 80 qui les ont le plus marqué, il y en a invariablement une qui surgit immédiatement dans les 5 premiers. Et pourtant, elle n’a fait qu’un passage éclair dans le paysage audiovisuel.

Mais elle a, en seulement 8 épisodes, inscrit son empreinte dans l’inconscient collectif. Pas forcément pour le meilleur par contre.

C’est dans la veine du succès de L’INCROYABLE HULK que nait en effet le projet de l’homme-animal. A l’origine, il y a Glen A. Larson, un producteur génial qui connaît la recette du succès et à qui l'on doit entre autre L’HOMME QUI TOMBE A PIC, GALACTICA, MAGNUM P.I., K 2000 ou encore BUCK ROGERS et consorts.

La genèse d'une idée

La légende veut que cette idée formidable germe dans son esprit alors qu’il visionne un épisode de L’INCROYABLE HULK au fond de son canapé, caressant le poil soyeux de sa chatte. Un flash illumine son intellect "Et si j'entrais dans la peau de ma chatte ?" se dit-il. 

Pervers ! Qu'à cela ne tienne, le voilà lancé dans l’écriture d’un pilote pour une nouvelle série qu’il intitule immédiatement MANIMAL.

Voilà l’idée sur les rails du succès. Glen A. Larson a déjà le script en tête. 

Il imagine comme personnage principal un jeune scientifique de renom, le professeur Jonathan Chase, plutôt beau garçon et disposant d’une situation confortable dans la vie. 

L’homme enseigne les sciences animales à l'université de New York et cela paye bien. Jusque-là rien de plus banal.

Notre producteur et scénariste lui ajoute un ingrédient supplémentaire qui va tout changer. Le professeur Chase est en effet un homme mystérieux. 

Après avoir parcouru le monde "depuis les replis les plus profonds de l'Afrique, jusqu’aux sommets les plus élevés du Tibet", en passant par le bistrot du sommelier, notre héros a pu étudier pendant de longues années aux côtés de son père les mystères insondables de la Nature. Ça en jette.

Et quelques caisses de vin plus tard, le voilà devenu le gardien d’un secret ancestral : il peut contrôler sa morphologie et se transformer en l'animal de son choix. On ne sait pas trop comment, mais en fait on s'en fout. Ca doit être l'alcool.

Jamais sans animal

Du coup, pour garantir une pérennité à la série et lui permettre de tourner sur des intrigues qui dépasseront l’épisode pilote, l’homme-animal choisit de mettre son don au service de la police afin de combattre le crime. 

Il aurait pu choisir de cambrioler des banques et de se faire plein de pognon ni vu ni connu, mais non, évidemment, il vaut mieux véhiculer une image positive auprès du peuple américain pour que la série soit acceptée dans les networks (J'aurais pas fait comme ça). 

Bon. Ok. Alors il sera foncièrement bon et gentil ? Ben oui… Mince. Et beau gosse.

En quête de justice

Notre homme se lance par conséquent dans une quête de justice. Pour cela, il est accompagné de son fidèle ami, Tyrone C. Earl allias Ty, qui l’assiste sur les affaires criminelles. 

A l’instar de David et Jonathan, Ty et Jonathan se connaissent depuis qu’ils ont combattus ensemble contre les Viêt-Cong. Cela créé forcément des liens mon colonel.

Pour la petite histoire, cela se passe comme ça. 

Un jour de guerre, alors qu’ils sont emprisonnés ensemble dans une cage viet-cong d’un mètre de côté, Jonathan n'a pas d'autre choix que de se transformer non pas en goéland, mais en panthère pour qu'ils puissent s'échapper. 

Ty est alors au courant de l'étrange faculté de son pote de guerre et depuis les deux vont devenir inséparables. 

Les pouvoirs de Jonathan ne semblent poser aucun problème à son compagnon, bien au contraire.

Mais ce n’est pas tout. Pour ajouter du piment aux intrigues, il est toujours nécessaire d’introduire une femme dans l’histoire en plus du cheval. 

C'est donc au cours d'une enquête que Jonathan rencontre la séduisante Brooke McKenzie, policier de son état, et qui tombe complètement sous le charme animal de Jonathan. Particulièrement amoureuse et jalouse, elle surveillera Jonathan comme le lait sur le feu.

Jonathan la classe

Il faut dire que Jonathan dispose d’une classe naturelle qui fait chavirer les femmes et les animaux. Celui-ci n’aura pourtant l’occasion d’embrasser des femmes qu’à 2 reprises en 8 épisodes, ce qui, pour un héros, reste relativement peu. En comparaison, Magnum en embrassera beaucoup plus en 8 épisodes que Jonathan, c’est dire si le côté positif de notre héros tranche foncièrement avec ses rivaux télévisuels.

Un script de choix

En quelques lignes, le décor de cette fabuleuse saga est donc planté. Le trio agit pour le bien de l’humanité, contre la crise obligataire. Fort de ce postulat de base, inutile de dire que le succès est attendu par le producteur Glen A. Larson. 

Celui-ci choisit de se lancer dans un casting international pour trouver la perle rare qui incarnera toutes les valeurs véhiculées par le professeur Chase. 

Il faut en effet quelqu’un qui bénéficie d’une classe naturelle car, dans la bible des personnages, le professeur est un homme très élégant et très cultivé. 

Il ressemble, qui plus est, à un parfait aristocrate anglais, boit du thé, porte le smoking blanc et dispose d’une fortune qui le met à l’abri du besoin pour le reste de sa vie. En plus il milite à la LPO.

Un autre coup d’œil sur la bible nous renseigne encore plus sur ses capacités : Jonathan s’intéresse aux plantes, grâce auxquelles il soigne les animaux, il pratique les arts martiaux et la méditation Zen, converse avec les animaux par la pensée comme le Dr Doolittle, mais sans dire "Eh Mec !", et sait se faire obéir d’eux. 

Par ailleurs, il parle et lit plusieurs langues dont le grec et le Klingon, mange des raviolis en boîte sans se tâcher, a une licence de pilote privé et est allergique à la pénicilline. Bref, c’est la classe incarnée.

Le beau gosse de service

Le choix du comédien pour endosser ce rôle se révèle alors crucial. Il doit être capable de porter le brushing parfait et c’est sur ce critère capillaire que s’effectue en priorité toute la recherche. 

Autant dire que le choix est cornélien. Finalement, c’est sur Simon Mc Corkindale que se porte l’attention de Glen A. Larson. Originaire de Cambridge, Simon Mc Corkindale possède tout le charme et la rigueur britanniques pour incarner notre héros. Et surtout, une coupe de cheveux impeccable. 

Au moment où Simon Mc Corkindale est choisi, l’acteur surfe sur le succès de ses précédentes apparitions à l’écran, notamment dans LES DENTS DE LA MER 3 où son flegme britannique fait sensation lors du duel avec le requin. 

Révélé en 1974 dans une série B aux côtés de Richard Harris, Anthony Hopkins et d’Omar Sharif, Simon poursuit sa carrière en jouant en 1978 dans MORT SUR LE NIL, puis dans LES AVENTURIERS DE LA SIERRA LEONE au début des années 80. MANIMAL est pour lui l’occasion d’être adoubé auprès du grand public. 

A la suite

Mais il n’y a pas que lui. La série MANIMAL s’articule autour de 2 autres immenses acteurs. Melody Anderson, qui joue le rôle de Brooke, et qui est déjà bien connue lorsqu’elle accepte la proposition de Glen A. Larson. 

Elle a notamment tourné dans le film FLASH GORDON et fait plusieurs apparitions dans les séries L’AGE DE CRISTAL, DALLAS, HOOKER, L’HOMME QUI TOMBE A PIC et L’AGENCE TOUT RISQUE.

Ensuite il y a le rôle de Tyrone, joué pour le pilote par Glynn Turman que l’on peut apercevoir dans GREMLINS. 

Evincé au terme du pilote, son rôle sera repris dans les autres épisodes par Michael D. Roberts. Ce dernier fera quelques apparitions dans CODE QUANTUM.

Ce trio spectaculaire est donc chargé de résoudre les enquêtes. Car Ty et Brooke ont une influence importante sur le professeur Chase. 

L’équipe de choc met en effet la main à l’ouvrage et se retrouve souvent en grande difficulté.

Action trépidante au programme

Chaque épisode se fait ainsi l’écho de leur engagement auprès de Jonathan. Tous les trois ont par exemple la particularité de se retrouver systématiquement prisonniers des bandits qu’ils cherchent à confondre. C’est alors le moment propice que choisit le professeur Chase pour se transformer en panthère ou en ragondin.

Une autre particularité réside dans les scènes de filature et de poursuite. Il n’est pas rare que les bandits qu’ils cherchent à confondre réussissent à s’enfuir en voiture. 

C’est alors l’occasion rêvée pour le professeur Chase de se transformer en faucon millénium afin de les poursuivre. Depuis, on a inventé le GPS.

Effet spéciaux très spéciaux

L'un des effet les plus spéciaux est la transformation en poulet. Notez au passage que ce sont ses bras qui sont transformés en pattes. 

Donc pour les ailes, ce sont les jambes, logiquement. Si vous arrivez à voler en bougeant les jambes de haut en bas, alors c'est que vous êtes fort...

Plusieurs scènes cultes se font également l’écho des pouvoirs exceptionnels de Jonathan. Lorsque Brooke se retrouve coincée dans des sables mouvants et que Jonathan se transforme en serpent pour lui sauver la vie. Ou lorsqu’un témoin se retrouve enfermé dans une caisse en bois et est jeté à la mer. Il suffit que Jonathan se transforme en Flipper le dauphin pour qu’il réalise un exploit en le sauvant d’une mort certaine et lui apporte du Galak.

On le voit, ce qui fait avant tout la particularité de cette série, et ce que le public retient encore 25 ans plus tard, ce sont les spectaculaires effets spéciaux des transformations de notre héros en animal. C’est dire l’efficacité extraordinaire de ces effets...

Ils sont l'œuvre de Stan Winston, un des meilleurs spécialistes hollywoodien de l’époque, oscarisé pour son travail sur TERMINATOR 2 : LE JUGEMENT DERNIER et ALIENS. 

C’est lui qui a supervisé personnellement la transformation en panthère et en faucon. 

Réalisée à partir de maquettes et de dessins, il utilisa ensuite des masques en latex, des poches gonflables, des articulations mécaniques et des effets d’optique à partir de plans qu’il avait travaillé, afin de pouvoir effectuer toutes les étapes de la transformation du professeur Chase. 

Des têtes mécaniques étaient également employées pour certains plans. Quant au maquillage en lui-même, il durait environ 6 heures. Ces techniques d'effets spéciaux furent reprises dans de nombreux films des années 80.

Transformations en chaine

Au cours des 8 épisodes, nous aurons l’occasion de voir le professeur se transformer successivement en panthère (dans tous les épisodes, car il faut amortir le prix des effets), en faucon (épisodes 1, 2, 4, 5, 6, 7, 8), en chat (épisode 1), en requin (épisode 1), en perroquet (épisode 3), en dauphin (épisode 4), en cheval (épisode 5), en serpent (épisode 6), en buffle (épisode 7) et en ours brun (épisode 8). Il manque l’épisode 9 où il doit se transformer en platypus et en octodon. A chaque fois, c’est l’occasion pour le professeur Chase de changer de chemise.

A chaque fois, des dialogues d'une subtilité palpitante sortent de l'ordinaire...

Une seule saison suffit

Programmé sur NBC le vendredi soir de 21h à 22h, à partir du 30 septembre 1983, le show ne dure que jusqu’au 17 décembre 1983 soit l’équivalent de 8 épisodes sous la forme d’un pilote de 90 minutes et de 7 épisodes de 47 minutes. Malgré le bon accueil critique de l’épisode pilote, la part de marché du programme ne cesse par la suite de s’effondrer.

Il faut dire qu’en face, DALLAS fait des ravages sur CBS dans la même case horaire. Le public ne s’y trompe pas et préfère le cynisme de JR à la naïveté juvénile du professeur Chase. 

Comme quoi notre héros aurait dû choisir d’attaquer des banques plutôt que de sauver la veuve et l’orphelin. Et puis notre héros n’est pas non plus favorisé par des épisodes savamment construits. Les enquêtes qu’il doit résoudre brillent par l’absence de suspense et se caractérisent par leurs piètres intrigues.

Du coup, faute d’audience et de budget, les responsables décident d’arrêter la production de nouveaux épisodes et de mettre un terme à l’aventure. Car le coût exorbitant des effets spéciaux et des cascades grève le budget de l’ensemble de la série. Les vrais fans n’ont alors plus que leurs yeux pour pleurer et doivent se repasser en boucle les transformations pour rêver à d’autres aventures.

Clap de fin

L’après MANIMAL pour Simon Mc Corkindale lui donnera l’occasion de briller à nouveau grâce à son brushing impeccable. Il divorce d’abord de sa première femme en 1984 pour se marier aussitôt avec l’actrice Susan George, dont il a un fils. Il reprend dès lors du service sur des enquêtes policières en décrochant un rôle récurant dans le feuilleton FALCON CREST de 1984 à 1986. 

Son look so british lui permet d’apparaître dans plusieurs séries de la fin des années 80 : SHERIFF FAIS-MOI PEUR, L’ÎLE FANTASTIQUE, L’AMOUR DU RISQUE, DYNASTIE ou encore MATT HOUSTON. De grandes séries à succès. Mais notre homme préfère retrouver ses racines plutôt que de succomber au miroir aux alouettes et se perdre dans les méandres des castings hollywoodiens.

Il s’installe à Londres à la fin des années 90 pour éviter de faire la course aux cachets et y fonde une maison de production avec sa femme. 

Bref, une vie bien tranquille ponctuée de quelques apparitions épisodiques dans des téléfilms (LA FEMME NIKITA) ou des publicités pour des shampoings.

C'est le 14 octobre 2010 qu'il atteint les sommets en réussissant sa meilleure transformation, en se réduisant en poussière à la suite d'un Cancer. RIP Simon.