COCO versus CYPRIEN

Bienvenue dans le panthéon des films qui devraient s’arrêter au visionnage de la bande annonce ! Et encore sans aucun espoir de prix du court métrage…

Au cours d'un atelier d’écriture, je me souviens d’un éminent scénariste qui nous a fait passer le message suivant : « chérissez la comédie ! » disait-il. Il n’y a pas qu’à nous qu’il a dû faire passer ce message puisque, depuis plusieurs mois, un amoncellement de comédies, ou prétendues telles, s’est accumulé sur l’autel du cinéma français. Et encore je pourrais plutôt écrire « s’est accumulé sur les latrines du cinéma français » parce que là, j’avoue qu’on a atteint des sommets de merde… Oups, je m’emporte ? Vous seuls pouvez vous faire votre jugement mais, pour en revenir au sujet, je vous propose de vous éclairer avec un petit focus sur les deux dernières comédies en date : COCO et CYPRIEN.



Avec ces deux sketchs long métrage, je ne cesse de me poser cette question : peut-on, à partir d’un sketch de 2 minutes, faire un film entier ? Avec ce qu’on est sensé voir dans un film normal, c’est-à-dire une structure dramatique, des personnages étudiés et crédibles, des seconds rôles forts ou au moins présents, des intrigues et même quelquefois un message véhiculé, bref juste un scénario… Le pari est toujours assez ambitieux… Est-il réussi dans les deux exemples qui nous sont offerts ? Hélas, je crains qu’avec ces deux films, l’objectif d’une écriture réussie n’ait pas été atteint… Mais était-ce vraiment l’objectif ? Ah, ah, m’est d’avis que non…


Le cas de CYPRIEN est assez problématique puisqu’il s’agit, osons le dire, d’un remake de Dr Jerry et Mister Love… Mais n’est pas Jerry Lewis qui veut. Surtout Elie Semoun. A la rigueur, on aurait fait jouer Dieudonné à sa place, là au moins, on aurait pu rire, jaune peut-être, mais nous aurions eu droit à une franche rigolade. Hélas, non. Nous sommes passés à côté de ça. Personnellement, je dis que lorsqu’on s’attaque à un remake ou que l’on plagie une œuvre, il faut au moins avoir la décence de faire mieux que l’original. Sinon, on se tait. Et on fait autre chose.

Dans le cas de COCO, c’est en se penchant sur la lecture du scénario que l’on aperçoit le néant. Je cherche toujours en vain une raison à ce film, de même qu’une intrigue solide capable de le porter du début à la fin. Mais est-ce ce que le public recherche ? Est-ce surtout ce qu’a recherché Gad Elmaleh ? N’est-ce pas plutôt un entrainement en live à la réalisation ?

Observons pourtant les résultats du box office. Pour COCO, le public aurait apparemment fait peu de cas de la construction du film ni de son scénario… Une promo tapageuse entièrement centrée sur l’aura scénique de Gad, une sortie ciblée pendant le printemps du cinéma. Il aura fallu tous ces ingrédients pour obtenir le succès en salle malgré des tares qui n’échappent pas aux spectateurs les plus indulgents. Au total, ces artifices ont valu à COCO un démarrage exceptionnel avec 1 806 263 spectateurs. Plein de pognon !!!! Quant à CYPRIEN, un bon démarrage également avec 360 301 spectateurs.
Des chiffres honorables qui raviront les producteurs et qui placent leurs stars parmi les acteurs bankable dans leur domaine de prédilection, à savoir la comédie non comique. Mais à l’avenir, seront-ils suivis par un bouche à oreille élogieux ? Ne ternissent-ils pas leur image ? Question…

D’un point de vue personnel, tant que les spectateurs iront voir en masse ce genre de film mauvais, l’industrie continuera à leur fournir toujours le même genre de spectacle. « De la merde » dirait Jean-Pierre Coffe. Mais le public ne pourra pas dire qu’il n’a pas été prévenu. Qu’on ne me dise pas « la bande-annonce avait l’air bien » parce que tout le monde sait très bien que toutes les blagues y sont maintenant systématiquement concentrées et qu’en dehors de cela il n’y a presque plus de matière. Quand, à la sortie d’un film, j’entends « c’était nul, les seuls trucs marrants je les avais vus dans la bande-annonce » je fulmine ! Il ne faut pas être dupe ! Qui plus est lorsque la promo a été d’un tapage médiatique proche de la propagande, et que le faciès de la star est apparu dans tous les JT et toutes les émissions de promo sur toutes les chaines.

Quelquefois, je me prends à rêver d’un spectateur responsable qui raisonne avant d’acheter une place de cinéma, surtout au prix qu’elle coûte ! Mais non ! Résultat, nous sommes toujours aussi nombreux à aller en salles et à nous plaindre après coup, de la piètre qualité des films visionnés. Et cela à une époque où maintenant, télécharger ces mêmes merdes est devenu un acte criminel (en France…).

Pour finir sur une note d’humour, je terminerai par rassembler quelques commentaires sur ces deux films. Je trouve en effet plus de matière humoristique dans la lecture de leurs critiques que dans leur visionnage …

COCO :
20 Minutes : (…) Gad Elmaleh a imaginé son film en comédie culte, mais n’a obtenu qu’un film cucul.
L’Express : (…) écrasé par l'importance de ce personnage qui est dans tous les plans, le film s'étouffe très vite. Les seconds rôles passent comme des étoiles filantes sans être exploités, l'intrigue n'existe jamais, à force de s'enfermer dans des impasses narratives et le rythme claudique, de gag attendu en jeu de mots raté. Le tout constituant un mauvais ersatz de La Vérité si je mens ! Un comble, pour une création originale.
Dvdrama : (…) Le film, pour lequel les meilleurs moments sont regroupés dans la bande-annonce, fait l’effet d’une coquille vide.
Libération : (…) Coco s’essouffle à l’esbroufe, à trouver des bourdes poilantes à gratter, des mots et tourne court faute de fil, situations, rôles. Bonne bande-annonce.
Brazil : (…) L’équipe de Brazil vous annonce les prochains films désopilants de Gad Elmaleh : Culcul, Caca, concon.
Filmactu : Même les fans de Gad Elmaleh resteront sur leur faim : les performances physiques de l’acteur/mime sont inexistantes, les tentatives d’émotion ne fonctionnent pas (…) un film d’une platitude incompréhensible, à peine digne d’une diffusion TV.
TéléCinéObs : (…) Sans scénario solide ni seconds rôles crédibles, le film s’enlise dans le vide.
Paris Match : On ne fait pas du XL avec du small (…) Coco a loupé sa bar-mitsva et Gad son baptême de réalisateur. Shalom et à la prochaine…
Le Figaroscope : L’intrigue, inspirée par un personnage d’un spectacle de Gad Elmaleh, tient en deux lignes, les dialogues sont affligeant, les blagues éculées.

CYPRIEN :
Les Inrock : (…) Si ses « Petites Annonces » ont su trouver un public toujours aussi friand de personnages atypiques généralement irrésistibles, cela ne suffisait pas à notre ami Elie Semoun qui ressentait ce besoin, souvent inexplicable, qu'ont tous les humoristes, celui de faire carrière au cinéma. En ce sens, nous comprenons parfaitement la démarche de cet homme. La plupart de ses collègues ont d'ores et déjà franchi le cap. Il ne pouvait donc en rester là. Après quelques participations en tête d'affiche de longs-métrages plus ou moins comiques et aujourd'hui complètement oubliés (Tout doit disparaître, Le clone, Charité Biz'ness...), il se devait de "réaliser" SON film, dont il serait, à l'instar de Franck Dubosc, Jean Dujardin ou bien encore Jean-Marie Bigard, l'auteur et le comédien principal. (…) Et dire que de jeunes artistes peinent encore à faire leur premier film...
Métro : Mauvaise parodie d’une pub pour un déodorant, gags prévisibles et mal fichus, personnages à côté de la plaque (…) désespérant.
En conclusion, amusez-vous à lire les critiques !

1 commentaire:

  1. Dans le même genre "ça aurait dû rester un sketch", on pourrait citer "RRRrrr" des Robins des Bois et "Chouchou" déjà commis par Gad Elmaleh... Tout le monde n'est pas capable d'écrire "Brice de Nice", "Wayne's World" ou "Austin Powers" !
    Quant au financement des films français, c'est un vrai scandale ! Quand on voit les merdes qui sortent ("Les Bronzés 3", les films de Weber, etc) et qu'on imagine tous les films de jeunes cinéastes qui restent dans les cartons, ça donne envie de gerber.

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