Toutânkhamon vous attend à la Grande Halle de la Villette

Mort à 19 ans, fils d'un Pharaon hérétique imposant le culte d'Aton, Toutânkhamon était voué à disparaitre à jamais de l'Histoire, son cartouche effacé des tablettes, ses effigies détruites. Mais grâce à l'égyptologue Howard Carter, le voilà qui renaît de ses cendres et vient à la rencontre du public français jusqu'au 15 septembre à la Grande Halle de la Villette. Voyage, voyage.

La ténacité payante

Si la ténacité de Howard Carter, et de son mécène Lord Carnarvon, n'avaient pas duré de nombreuses années, en dépit des railleries et des millions de Livres dépensées, le souvenir d'un obscur Pharaon n'aurait jamais perduré.

Obscur, parce que personne n'aurait pu imaginer que l'on retrouve un véritable trésor et surtout, que l'on retrouve la trace d'un Pharaon volontairement effacé de l'Histoire. Le Pharaon de la XVIIIe dynastie égyptienne, au 14e siècle avant JC.

Il aura fallu presqu'une vie entière consacrée à cette épopée, déclenchée par la découverte d'un simple cartouche atypique dans la Vallée des Rois, pour que le but soit atteint le 4 novembre 1922, après des années de fouilles. 

Un escalier, une entrée, un tombeau, une chambre funéraire, un bordel sans nom qui aurait déclenché un orgasme chez Marie Kondo, de l'or partout qui aurait fait fantasmer tout rappeur digne de ce nom, et un sarcophage unique au monde, intacte, première main et presque sorti d'usine avec zéro kilomètres au compteur.

Une découverte stupéfiante

Révélé devant le monde éberlué, apparaissait alors une chambre funéraire renfermant une énigme de l'antiquité. Toutânkhamon, né Toutânkhaton, couronné à l'âge de 9 ans et décédé dans d'obscures circonstances à l'âge de 19 ans (une infection suite à une chute de char, selon Bones), sortait de sa cave tel un Batman de l'antiquité, pour illuminer la planète de sa légende. 

On aurait presque pu imaginer un projecteur diffusant dans le ciel nocturne la marque de son cartouche, tel un signal lancé au monde entier. "I'm back".

Pourtant, ce Pharaon avait tout pour ne pas durer et tomber dans les oubliettes de l'Histoire. 10 ans de règne, des parents jugés comme hérétiques, car ayant tenté d'imposer le culte d'un Dieu unique, Aton, dans une Egypte absorbant une pléiade de divinités à chaque repas. Et une consanguinité digne de la secte du Temple Solaire. Il avait réellement tout contre lui.

Plus de 150 pièces présentées

C'est donc lui, ce héros malgré lui, que l'on découvre aujourd'hui jusqu'au 15 septembre à la Grande Halle de la Villette, dans une scénographie digne d'Hollywood. Il faut au moins ça.

Avec un nombre impressionnant de pièces uniques, plus de 150, proposées à la vue du grand public, on a vraiment affaire à un world tour de rock star. 

Le Toutânkhamon Tour, on pourrait l'appeler ainsi, est considéré comme son grand retour. Ou plutôt comme son dernier retour, ses adieux en quelques sortes. 

Un peu comme ces artistes qui font leurs adieux au Music Hall (mais qui trouvent toujours une occasion pour faire leur come-back, il faut bien payer leurs impôts et taxes).

Bref, ce n'est pas tous les jours que l'on voit ce Pharaon chez nous. Pensez donc, la précédente tournée date de 1967. C'était au Petit Palais, et il avait déjà fait un tabac à l'époque. 

Guichet pris d'assaut, tickets écoulés en moins de temps qu'il en faut pour le dire, émeutes urbaines devant le musée, poubelles et voitures brûlées, jeunes de banlieue. Succès au rendez-vous donc, avec plus de 1,2 millions de visiteurs. 

La dernière tournée

C'est ce qu'on appelle, non pas l'effet Impulse, mais l'effet Toutânkhamon. Car autant dire que ses apparitions sont rares. Surtout que celle-ci, en guise de "Last show", contient des pièces jamais sorties du Caire, et que l'on n'est pas prêt de revoir de sitôt chez nous. A moins peut-être, que l'on ne décide d'envahir l'Egypte au nom de la démocratie pour rapatrier tout le Musée du Caire directement au Louvre.

Eh oui, en 2022, le Pharaon star regagnera ses pénates ad vitam aeternam. Ou plutôt il regagnera de façon définitive le Musée du Caire, actuellement en rénovation, et où l'on prépare en effet son grand retour avec des salles spéciales, réalisées à sa dimension. Épique. Un GEM, comme on dit chez les aficionados : Grand Egyptian Museum.

Voilà donc un exilé malgré lui, et c'est pour notre plus grand bonheur, et surtout, pour le plus grand bonheur du Musée du Caire, qui engrange au passage de substantielles rétributions et écoule ses goodies brandés "King Tût" à qui mieux-mieux et à vil prix. Mais c'est le prix qui contribue à faire vivre la légende. 

Le Mug King Tût, qui vous réveille le matin au goût du café équitable, le travel mug King Tût qui vous donne la classe dans le métro, aux côtés de votre trottinette mainstream pliée en deux... Les sweat-shirt King Tût qui vous feront passer pour un super héros à la salle de muscu. 
- "Woa, King Tût ? Mais c'est quoi ce groupe de Rap ?"
- "Tu peux pas connaître", répondrez-vous.

Non, bien sûr.

Bref. Succès assuré, je vous dis.

Ce que nous offre Toutânkhamon

Un peu comme le concert des adieux de Marcel Amon, le dernier tour de Toutânkhamon, donne tout sur la scène de la Grande Halle de la Villette.

Le tout dans une mise en scène que n'aurait pas renié Mylène Farmer. Dès l'entrée on démarre le grand voyage. 

S'ouvrent alors les portes du tombeau et au fil des oeuvres exposées, on nous invite à découvrir le mystère du passage de vie à trépas, à travers les rites de momification, les biens et outils qui doivent accompagner le souverain jusqu'à l'accueil dans l'au-delà et qui furent retrouvés dans le capharnaüm souterrain.

On trouve en vrac. Son bouclier cérémoniel en bois doré, son fauteuil de bois, ébène, ivoire et feuilles d'or, son arc, son lit en bois doré, jusqu'à sa paire de gants en lin brodé de soie, digne de Mickael Jackson. 

Eh oui, on retrouve donc tous les plus grands succès, tout ce qui a fait la renommée du Pharaon disparu. 

Tout ?

Vous êtes sûr ?

Il ne manque pas un truc ? 

Et pas n'importe lequel d'ailleurs. Une pièce de choix, puisqu'il s'agit de son masque funéraire !

Oui, son masque en or et Lapis-lazulis, qui trône sur son sarcophage. Auquel on s'attend à la vue de l'affiche de l'exposition.

Sauf qu'en lieu et place de ce masque, c'est une réplique en résine, sombre, à laquelle on a droit. 

Dommage.

Mais bon, on va pas non plus se plaindre, puisque l'aventure continue avec l'immortalisation née de la rencontre du Pharaon et de son découvreur. Une salle spéciale y est consacrée. Flamboyante d'émotion, qui retrace le destin de ces deux personnages emblématiques.

Et puis, ainsi va la vie, tout fini non pas par une chanson mais par la sortie. Vers le magasin et les goodies à vendre. Là, surprise, pour les déçus du voyage, trône enfin le masque tant désiré, avec une réplique à la vente. Pour 23 K€. Prix d'ami.

Tant pis, au moins, partez avec la casquette "King Tût".

James Bond aurait pu dire une sentence du genre, "On ne meure que deux fois. la première est quand on meure, la seconde est quand on vous oublie". 

On est sûr que Toutânkhamon ne sera pas oublié, malgré un règne court, de 1336 à 1326 avant JC. C'est le prix de l'immortalité.

Je ne saurai que trop vous conseiller de vous précipiter à cette exposition historique. Vous contemplerez une immense page d'Histoire, voyagerez, et atteindrez ainsi l'éternité.

L'affiche de l'exposition. Non pas le masque funéraire, mais une miniature du sarcophage visible à la Grande Halle de La Villette. Sublime.

Exposition Toutânkhamon, le Trésor du Pharaon
Jusqu'au 15 septembre 2019
Grande Halle de la Villette
Billetterie : info@expo-toutankhamon.fr  - 08.92.39.01.00
Site et réservation :https://lavillette.com/programmation/toutankhamon_e185