Le pays de l'Oncle Jess

Lors de mon passage éclair sur l'American Tours Festival, j'ai eu la chance de voir de nombreux véhicules mythiques de l'industrie automobile US. Hélas, il y en a un que je n'ai pas vu. Une Dodge Charger modèle 1969 et son V8 de plus de 400 Ch fonctionnant à l'essence ou à l'alcool de contrebande selon les besoins. J'ai aussitôt pensé à Oncle Jess.

Le retour du sherif

L'occasion est trop belle pour en parler et surtout, pour mettre en avant l'un des comédiens les plus emblématiques de ce programme culte des années 70-80, au point d'en devenir totalement indissociable. 

Il s’agit de l’immense Denver Pyle et de ‘’THE DUKES OF HAZZARD’’ allias ‘’SHERIF FAIS-MOI PEUR’’.

On peut parler de symbiose d'ailleurs, car autant à l'époque son nom a été en partie à l'origine du succès, autant l'on peut affirmer sans trop se tromper que cette série a conforté sa renommée et fait sa gloire auprès des plus jeunes.

L'homme à la salopette

Denver Pyle, toute salopette et barbe blanche dehors, n’est autre que le fameux Oncle Jess, le vieil oncle au grand cœur, vantard et furibond, toujours prêt à en découdre à coup de fusil pour protéger ses deux neveux débiles (Bo et Luke Duke) et sa nièce limite traînée (Daisy Dukes) face au joug de l’état policier corrompu par le grand capital, et incarné par Boss Hogg et son fidèle taré Rosco P. Coltrane.

Bref, pour faire simple, cette série n’est en fait qu’un hymne à la gloire du sud fédéré des Etats-Unis. 

A cela s’ajoute aussi une nostalgie sudiste qui fleure bon l’esclavage et le blues des champs de coton. 

Enfin, il s’agit surtout de convertir à la Country, d’autant plus que le narrateur de la version originale était Waylon Jennings, un chanteur de Country Music particulièrement renommé.

Décor grandeur nature

Le décor de SHERIF FAIS-MOI PEUR se plante dans le contexte d'une parabole qui prône la désobéissance civile à coups de cascades en voiture, une sorte de ‘’Fast and furious’’ avant l’heure avec des jeunes de banlieue fermière, désertique et désolée, en guise de rebelles paumés.

Il n'y a pas de quoi fouetter un chat. Mais le pire c’est que cela a fonctionné. En l’espace de 7 saisons ce programme s’est élevé au rang de série culte.

Pour en revenir à Denver Pyle, peut-être s’agit-il du personnage le plus attachant de la série, ou bien le privilège de l’âge nous rend-il plus indulgent ?

Toujours est-il que c’est sans nul doute le personnage qui a marqué le plus les téléspectateurs, bien que son rôle soit secondaire.

Derrière le fameux Oncle Jess

Denver Pyle est arrivé sur le tournage dès le début de la série, en 1979. Il venait suivi par un fan club relativement âgé mais avec l'aura de l’acteur le plus capé. Pourtant, pour les plus jeunes, et qui constituaient la cible du programme, c’était un véritable inconnu. 

Rapidement, cette série a donc eu un effet important pour lui en terme de reconnaissance et elle a agit comme une cure de jouvence. 

On découvrait alors que sa carrière avait commencé dès 1947 et ne se résumait pas uniquement à cette série. Comédien de classe, il avait déjà à son actif 63 films au moment d’intégrer le casting de SHERIF FAIS-MOI PEUR.

Naissance d'un carrière

Denver Pyle est né le 11 mai 1920 à Béthune dans le Colorado, et pas dans le Nord. 

Son prénom vient directement de la ville de Denver et a été choisi par sa mère dont c’était la ville préférée. 

Du coup, le petit Denver est déjà sous le signe de l’originalité. Très tôt il se découvre un talent inouï de bout en train et une passion étonnante pour le port de la salopette de clown, un attribut qui inspirera directement Coluche. 

Il sait déjà dès le plus jeune âge que son avenir passera par la comédie et le septième art et non par les études, pas même pour devenir fermier.

Denver est un aventurier dans l’âme. Vêtu de sa tenue fétiche, il passe son adolescence à lire les récits d’aventure des grands voyageurs et se découvre à l’âge de 14 ans une passion pour les romans de Jules Vernes : quand il sera grand il portera lui aussi une barbe et un chapeau haut de forme. 

Il forge dans les livres son rêve de gamin, découvrir le monde et partir naviguer sur un bateau en bois dans les mers du sud, bref, il a l’âme d’un poète, mais aussi d'un musicien. 

Lassé de l'école et des études, il se lance dans la musique en devenant batteur dans un groupe de jazz, mais sans connaître le succès. 

Dur retour à la réalité alors. il va alors faire ses bagages pour partir travailler de ses mains dans l'industrie pétrolière puis décide d'embarquer sur un crevettier. On est loin de Jules Vernes et de ses aventures palpitantes. 

Au bout du rêve

Néanmoins il s'accroche à ses rêves. Il part à Los Angeles pour tenter la comédie lorsque la guerre éclate. 

C'est pour lui l'occasion de s'engager dans la marine. Blessé à Guadalcanal, il est démobilisé et retourne à Los Angeles pour travailler dans une usine d'aéronautique. (Cet épisode reste soumis à controverse par ailleurs).

Cela ne lui suffit pas et il se lance dans le théâtre amateur. C'est à cette occasion qu’il intègre le monde merveilleux de la comédie. 

Repéré par John Wayne, il commence alors sa fulgurante carrière et va enchaîner les films, séries télé et apparition à l’écran jusqu’en 1997.

Son étonnant sens du spectacle lui vaut aussi d’être présent sur de nombreux shows télé en particulier THE ANDY GRIFFITH SHOW dans les années 60 et THE DORIS DAY SHOW dans les années 60-70 qui font exploser sa renommée comique. 

On le voit également dans plusieurs épisodes de Gunsmoke, Perry Mason, Kung Fu, Bonanza, the Twilight zone et Dallas.

Denver Pyle joue Emery Fillmore dans Perry Mason - 1961

Denver Pyle joue Tom Quincy dans Perry Mason - 1960

Denver Pyle joue Jackson Sidemark dans Perry Mason - 1966

Amitié cowboy

Une des ses premières apparition au grand écran a lieu dans THE FLYING SAUCER en 1950, mais c’est en particulier grâce aux western des années cinquante et soixante que sa réputation explose à l’écran. 

Il y tient à plusieurs reprises la vedette aux cotés de son pote John Wayne qui deviendra un de ses meilleurs amis. John aura l’occasion d’apprendre à cette époque au jeune Denver l’art délicat de monter à cheval, comment manier la cravache et le colt, bref comment parler aux femmes.

C’est sur le plateau d’un western de John Ford intitulé THE HORSE SOLDIERS en 1959 que Denver fait en effet la connaissance de John Wayne. On retrouve les deux potes dans THE ALAMO de John Wayne en 1960 puis dans THE MAN WHO SHOT LIBERTY VALENCE de John Ford en 1962.

Le western est un peu sa spécialité puisqu’on retrouve entre autre Denver dans GERONIMO d’Arnold Lavers en 1962, dans SHENANDOAH en 1965 aux côtés de James Stewart ainsi que dans MAVERICK en 1994 aux côtés de Mel Gibson et Jodie Foster. 

Il y joue l'un de ses derniers rôles, celui d'un vieux joueur de poker tricheur qui termine dans la rivière. 

A voir également dans ‘’Bonnie and Clyde’’ d’Arthur Penn aux côtés de Warren Beatty et de Faye Dunaway en 1967.

Denver Pyle en joueur de poker qui donne tout dans la Rivière... (Maverick)

Et finalement rien d’étonnant à ce qu’on trouve Denver Pyle honoré d’une étoile sur le célèbre Walk of Fame d’Hollywood boulevard à Los Angeles. La cérémonie a eu lieu le 12 décembre 1997 quelques jours avant que Denver ne parte rejoindre son pote John Wayne. 

Denver Pyle est décédé le 25 décembre 1997 des suites d’un cancer du poumon. Maintenant vous ne verrez sans doute pas de la même façon un épisode de SHERIF FAIS-MOI PEUR !