Sobibór frappe la mémoire collective

Rarement au cinéma un film offre un tel choc, brut, sans concession, au point de devenir une pièce magistrale au service de la mémoire collective. Sobibór, de et avec Konstantin Khabensky, est de cette trempe. 

sobibor de konstantin khabensky sur lacn

La grande évasion

Ce pourrait être le récit d’une simple évasion comme on en voit tant au cinéma. Ici, c’est une histoire vraie, qui s’est déroulée il y a 75 ans maintenant.

Une histoire qui nous fait découvrir Alexander «Sacha» Petcherski, à l’origine de la seule insurrection réussie dans un camp de la mort. Celui de Sobibór

affiche de sobibor de konstantin khabensky sur lacn

Sobibór, de son nom allemand officiel SS-Sonderkommando Sobibor, était un camp d'extermination nazi sur le territoire sud-est de la Pologne actuelle. Il a fonctionné de mai 1942 jusqu’à octobre 1943.

Au cours de cette période des centaines de milliers de juifs venant de Tchécoslovaquie, de France, de Pologne et d'autres pays européens y ont été tués. 

Ce camp d'extermination a cessé de fonctionner après une insurrection réussie de prisonniers, dirigés par un officier soviétique Alexander Petcherski.

Sobibór est plus qu’un témoignage

Au cinéma les films témoignage sont relativement rares. Ils sont pourtant les plus forts. Ils véhiculent un message que la puissance et l'horreur peuvent rendre difficile au regard d'une partie du public. Et pourtant, certains messages se doivent de passer devant l'histoire. Sobibór est de ces films-là. 

Loin des productions faciles et à grand spectacle faites pour divertir le peu de neurones disponibles qu'il reste chez le spectateur moyen français, Sobibór est un film brut, sans manières. 

scène de sobibor de konstantin khabensky sur lacn

Une justesse clinique rarement vue en salle

Retraçant un événement de la seconde guerre mondiale qu'une majorité de français ignore, voire se contrefiche, Sobibór a valeur d'exemple pour le pire comme le meilleur de l'homme. 

Le pire c'est la barbarie, l'humiliation et la terreur gratuite dont sont capables les bourreaux. Et dont on retrouve encore les relents idéologiques aujourd’hui, notamment dans certaines régions d'Europe de l’est. Il est délicat d’en rendre compte à l’écrit, tant les scènes reviennent à l’esprit et font mal. Elles s’enchaînent à la manière d’un documentaire.

Le meilleur, c'est le courage, l'abnégation, l'honneur des victimes et leur force de résistance. Une résistance qui a valeur d'exemple, jusqu’à la révolte. La volonté de ne pas se résigner transparait dans chaque scène du film. Elle est puissante. 

On suit ici la survie de ces prisonniers, condamnés à disparaître. La mort est omniprésente, sous tension, comme un personnage supplémentaire qui s’empare au hasard de la vie de chacun. Une mort qui prend le trait d’officiers allemands, de kapos. 

A ce propos, Christophe Lambert est méconnaissable. Il campe l’officier SS responsable du camp, sa froideur est à couper le souffle.

scène dans le camp de sobibor de konstantin khabensky sur lacn

Les autres comédiens sont au diapason et offrent une interprétation juste et bouleversante, c’est le cas de Philippe Reinhardt ou de Roman Ageyev. Ce sont des rôles dont on ne ressort pas indemne.

Un film pour l’histoire

Avec Sobibór, on est loin des canons grandiloquents du cinéma américain, tant il dérange par sa sobriété froide et pousse à la réflexion. 

Certaines séquences marqueront longtemps. L'arrivée des premiers wagons, et avec eux les premières victimes. La scène de la chambre à gaz, d'une puissance rarement vue à l'écran, comme les scènes d'humiliation, et surtout cette ouverture d'un wagon, glaçante.

Ce film a donc valeur de remise en question, et beaucoup ne pourraient pas le supporter. Heureusement pour eux, mais hélas pour le message historique du film, peu de français le verront. 

Confidentiel en France, au point de ne « bénéficier » que d’une sortie vidéo à la rentrée prochaine, il ne sera relayé nulle part. Dommage.

Au final, la plupart des évadés de Sobibór ont été tués, soit capturés et fusillés instantanément ou dénoncés par les populations locales et également exécutés. 

Seules 53 personnes ont survécu après la guerre. Alexander Petcherski, décédé en 1990, comptait parmi elles.

En quelques années, ce sont plus de 250.000 juifs qui furent exterminés à cet endroit, souvent dans l'heure suivant leur arrivée par convoi.

Sobibór est bien un film pour l'histoire.



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